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Les Textes de Vincent
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Les Textes de Vincent

VIP-Blog de vinny53poesie
  • 45 articles publiés
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  • Créé le : 25/03/2010 19:07
    Modifié : 26/06/2012 15:26

    Garçon (52 ans)
    Origine : la Mayenne
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    [ Les Furtives ]

    Demain Est Encore Loin ( suite)

    11/04/2011 16:09



                        Partie II

    Cet homme sans instruction qui l’avait élevé seul, après la mort de sa mère, entre son travail de manœuvre sur les chantiers et les ménages qu’il effectuait le soir dans les usines pour le compte d’une société de nettoyage. C’était un homme droit et juste qui lui avait inculqué les valeurs essentielles du courage et de la loyauté, du respect du travail et des autres. Pendant des années il avait trimé tel un forçat afin de permettre à son fils de connaître un meilleur sort, lui payant ses études. Hélas, frappé d’un cancer du pancréas qui l’avait emporté peu de temps après, le vieil homme n’avait pas pu assister à la remise de diplôme de son fils, prisonnier de son lit d’hôpital. Quand Marc était arrivée, avec toute la fierté qui l’envahissait, on lui annonça que son père venait de s’éteindre en silence, sans douleur apparente. Marc restait frustré depuis ce temps, de cet orgueil qu’il ne pouvait plus partager. A quoi bon réussir si l’on ne peut plus remercier ceux par qui le miracle s’est produit ? Cela constituait sans doute une des raisons de son manque d’obstination à combattre pour regagner les rangs de la société.

    Quand il s’éveilla, il n’en crut pas ses yeux. La pendule indiquait dix heures, la gare s’alourdissait d’un silence presque inquiétant. Non seulement Doc avait disparu mais pas un voyageur, pas un son de haut parleur ne venait troubler cette mort apparente. Pour la première fois depuis tellement longtemps, il avait dormi pendant une douzaine d’heures. Rien ni personne n’était venu troubler son sommeil réparateur qui lui faisait tant défaut. Malgré une certaine angoisse, il se sentait apaisé, comme reposé. Après avoir rempli son paquetage, il déambula à travers le hall, passant d’un quai à l’autre sans être inquiété. Les rails se voulaient désespérément déserts. Il eut beau chercher partout, pas un vigile, pas un policier, pas un militaire pour l’interpeller, ou lui poser des tas de questions. Il sourit, se croyant dans un rêve ou dans une autre dimension ou mort. Il finit par sortir de la gare, dans les rues, le spectacle semblait tout autre. Des barrières étaient installées le long des trottoirs et aux carrefours. Les gens arrivaient et s’entassaient derrière les barrières. Des banderoles bariolées de slogans syndicalistes s’étalaient un peu partout. On pouvait y lire « Au travail supplémentaire, augmentation de salaire » ou bien « Ras le bol d’être pris pour des gogols » ou encore « Des salaires égaux pour les chauffeurs de locos » et bien d’autres qui tapissaient les rues de la capitale. « C’était donc cela pensait-il, tout le personnel de la SNCF est en grève ! »

    Il crut percevoir au loin un cortège de manifestants qui scandaient des slogans, parfois des insultes. Il ne savait pas pourquoi, mais il se sentait solidaire de tous ces gens qui exprimaient leur ras le bol, contre les injustices qu’ils subissaient. Sans connaître la teneur exacte des revendications il ressentit le désir d’épouser ce combat, comme s’il éprouvait l’envie d’appartenir à nouveau à ce monde duquel il avait été évincé depuis toutes ces années. Il tenta de se renseigner ici et là, mais très vite on lui fit comprendre que sa puanteur, la crasse de ses vêtements, sa barbe jaunie et son air effrayant lui interdisaient de prétendre encore faire partie de la mêlée des travailleurs, des humains. Dépité, il cracha au cœur de cette foule en liesse.

    Après tout peu lui importait les bas salaires, le coût de la vie et leurs difficultés à « joindre les deux bouts ». Ils pouvaient crever dans leur soit disant misère ! Lui, il avait dépassé ce stade depuis longtemps. Ce n’était que caprices et futilités toutes ces exigences matérialistes. Oh il ne regrettait pas de ne plus appartenir à ce monde bourgeois et cupide qui en voulait toujours davantage quand lui et ses compagnons erraient par les rues, ventre affamé, sans toit, sans rêve et sans lendemain. Il s’attela à reprendre la route de son errance afin de prospecter sa nourriture.

    Le marché couvert de la rue Boilevent offrait de nombreuses denrées, l’un des rares avantages de ce quartier du seizième arrondissement, les clients étant difficiles, ce qui occasionnait une grosse perte pour les commerçants. Si certains savaient donner sans difficulté d’autres, ne voulant rien perdre de leur marchandise, se complaisaient à vendre à petit prix aux derniers clients moins argentés qui voyaient là une occasion de se nourrir à bon marché. Mais de petits prix pour ceux qui ne détiennent pas le moindre sou représentait encore trop et les gens comme Marc devaient se satisfaire des fruits et des légumes avancés pour ne pas dire pourris. Il se résigna malgré tout, se satisfaisant de ce que ces marchands lui offraient davantage par condescendance que par générosité. Ce jour là, assis sur son banc dans les jardons du Ranelag, il songeait à ce que pourrait être son avenir. Il admirait ces enfants insouciants qui s’amusaient au tourniquet, au toboggan, aux balançoires. Certains parents offraient des tours de poneys, les pauvres bêtes attelés à un manège de fortune tournaient pendant des heures afin de divertir ces « gosses de riches » inconscients du martyr qu’ils occasionnaient à ceux qu’ils croyaient être leurs amis. Marc faisait tâche dans ce tableau, son infortune l’incitait à haïr ces futurs héritiers pourtant étrangers à son cruel sort. Il avait beau penser qu’ils n’étaient que des enfants, malgré lui ils représentaient le pouvoir et la richesse. Pourquoi dans ce pays où selon le premier article de la déclaration des droits de l’homme « tous les hommes naissent et demeurent égaux en droits » ces enfants là étaient nés dans le coton et la soie, en un berceau où les fées de la richesse s’étaient penchées. Pour la première fois depuis le début de son infortune, il remâchait cette amertume. Sans doute le spectacle auquel il assistait lui offrait-il l’occasion de réaliser l’injustice humaine. Les bourgeois étaient ils pour autant responsables de ses maux, quand bien même, leur progéniture n’avaient pas à essuyer sa vindicte et son amertume. Ces enfants le méprisaient ils plus que les autres ? Pire ils l’ignoraient. Mais au cœur de cette ville bâtie sur l’iniquité et le profit, l’indifférence ne faisait-elle pas loi ? Si l’indifférence semblait identique de la part des autres, les raisons ne l’étaient pas. Les plus pauvres craignaient en le regardant, une misère éventuelle à laquelle ils pourraient un jour être confrontés ; les plus riches quant à eux, se complaisaient à faire l’amalgame entre misère et paresse, une manière prudente de se préserver de tout sentiment de compassion, signe, selon eux, d’une certaine faiblesse. Il prenait conscience qu’on le considérait comme un rebus de la société, au barreau le plus bas de l’échelle de la déchéance. Il lui fallait faire profil bas et se résigner, un comportement familier chez ses frères de la rue.

     

    Nouvelle soirée, nouveau coucher sur un matelas de fortune dans un recoin discret de la Gare du Nord, Marc parvenait à s’accoutumer à ce rituel sordide mais néanmoins nécessaire. Doc n’était pas venu, il devait seul, veiller à sa sécurité ainsi qu’à ce qu’on ne lui dérobât point son paquetage. La nuit s’allongeait dans cet amas de gens dont les paroles pouvaient être assimilées à des cris au sein de la cohue qu’ils formaient. Le sommeil le prit peu à peu, et il s’y laissa prendre. Le réveil s’annonçait beaucoup moins calme qu’il ne l’avait été la veille. La ville ayant reprit ses formes, les trains se succédaient à ne plus pouvoir les compter. Leurs freins crissaient tels une craie sèche sur un tableau noir, les oreilles de Marc n’en pouvaient supporter davantage, il rangea son balluchon et sortit sans attendre. Face à lui se tenait le célèbre « Hôtel du Nord » pas celui de Marcel Carné qui n’en n’était qu’une reproduction en décors de studio, mais le Vrai. Aussi beau que dans ses souvenirs cinématographiques, certes, le pont dévêtue d’Arletty et de Louis Jouvet avait beaucoup moins fière allure, mais il n’en restait pas moins fier et noble. Tout à coup il se sentit fatigué, usé, il s’assit à même le trottoir ce qui ne lui arrivait presque jamais. Il ne s’était pas assis depuis dix minutes qu’une passante, lui lança une pièce de deux euros, son sang ne fit qu’un tour, il se leva et se mit à l’agresser verbalement :

    n Hey mémère, je ne demande pas la charité, je ne suis pas un mendiant ! Je veux un peu de considération, un regard, un mot gentil, mais ne me jetez pas la pièce comme on lance des graines aux pigeons !

    La femme se retourna et le fixa, manifestement elle se sentait gênée, honteuse de son geste. Elle baissa la tête un instant puis revint auprès de lui.

    n Je vous prie de m’excuser, monsieur, je ne voulais pas vous blesser, j’ai fait ce geste machinalement comme je le fais quand je vois un malheureux.

    n Un pauvre, un malheureux comme vous dites, n’est qu’un sous homme à vos yeux, il n’existe pas !

    n Je…je ne pensais pas … enfin je ne pense pas cela ! Pour moi vous êtes un homme comme un autre.

    n Alors pourquoi me lancer votre fric à la gueule ?

    n Je…je ne sais pas, je sais c’est stupide ! puis je vous offrir un café ?

    n Un café ? hein ! Vous voulez vous racheter ?

    n Oui, euh prenez le comme vous voulez ! En tous cas c’est de bon cœur !

    n Ah ! Alors à ce moment là, je veux bien !

    Ils se dirigèrent vers le café le plus proche. Il marchait devant, elle le suivait, l’un et l’autre un peu gênés d’être vu ensemble mais nantis tous les deux d’une même volonté de se rapprocher. Quand ils virent cette dame bien de sa personne, élégamment vêtue en compagnie de ce « clodo » mal fringué, mal rasé et crasseux, le barman et les clients eurent envie de lâcher un rire sarcastique mais en observant le regard répréhensif de la dame, ils s’abstinrent. Marc et sa compagne se fixaient, détournant de temps en temps le regard pour mieux se fixer à nouveau. Ni l’un ni l’autre n’osait briser le silence. Elle aurait voulu lui demander qui il était et comment il en était arrivé là, mais elle pensait qu’il fût indélicat de l’inonder de questions personnelles. Lui, calme et apaisé, s’offrait sans retenue à ces yeux qui le poursuivaient. En dépit de l’ambiance tendue qui régnait entre ces deux là, une sorte de paix, de douceur étrange siégeait au sein de ce silence. Elle se lâcha la première en lui demandant :

    n Quel est vôtre nom ? Moi je m’appelle Eliane Lérot !

    n Marc !

    Soudain il se souvint qu’il avait un patronyme, un vrai nom de famille. Personne jusque là ne lui avait demandé. Il réalisait à l’instant qu’il possédait une identité, même si elle ne lui servait plus à rien, elle existait, c’était lui, il ajouta :

    n Gien, Marc Gien, merci !

    n Pourquoi me remerciez-vous ?

    n Parce que vous m’avez donné l’impression que j’existe !

    n Mais vous existez, vous êtes quelqu’un ! Et sûrement quelqu’un de bien !

    n Excusez-moi pour tout à l’heure, je vous ai mal jugé, vous avez payé pour d’autres !

    n Comment ça payé pour d’autres ?

    n Ben c’est vous qui avez fait les frais du mépris dont on me gratifie régulièrement !

    n Ne vous excusez pas, vous avez eu raison de me remettre à ma place. J’ai l’habitude de jeter des pièces aux mendiants, mais je ne m’étais jamais soucié de la personne à qui je les envoyais. Grâce à vous je viens de comprendre qu’un ère n’est pas anonyme, il y a un personne qui se cache derrière le masque de la pauvreté, un homme, merci de m’avoir ouvert les yeux. Vous devez me trouver stupide !

    n Pourquoi ?

    n Parce que je dis des choses d’une banalité affligeante !

    n Si vous saviez ! Tant de gens pensent que nous ne sommes plus des êtres humains !

    n Non ? Mais c’est évident que… qu’est-ce qui vous fait rire ?

    n Rassurez-vous je ne me moque pas de vous, c’est votre attitude qui prête à rire, je vous trouve…comment dire… adorable !

    n Ah ?

    n Non, ce n’est pas ce que vous pensez ?

    n Et qu’est ce que je pense à votre avis ?

    n Que j’essaie de vous draguer lamentablement !

    n Vous avez tout faux ! Je pense que si vous me trouvez adorable, ça veut dire que vous êtes encore capable d’éprouver ses sensations !

    n Des sensations ?

    n Oui enfin je veux dire que vous avez encore des émotions, vous vivez quoi !

    n Ben heureusement qu’il me reste encore ça !

    n Décidément, je dois vous paraître vraiment idiote !

    n Vous ne l’êtes pas, vous êtes mal à l’aise, je ne peux pas vous en valoir, la situation semble insolite.

    n Elle ne devrait pas l’être, intimidante certes mais qu’y a-t-il d’insolite dans la rencontre d’un homme et d’une femme ?

    n Cela dépend de ce qu’ils sont !

    n En ce qui me concerne je suis une jeune femme divorcée, mère d’un petit garçon de cinq ans et vous ?

    n A vrai dire je crois ne plus savoir qui je suis !

    n Vous êtes Marc Gien, mais quel est vôtre rêve, quels sont vos envies, vos souhaits ?

    n Ha ! Ha ! Ha ! Ha ! Ha !

    n Je ne vois pas ce qu’il y a de drôle !

    n Oh si ! Je suis là avec vous, ce qui en soit est déjà plus que je ne pourrais souhaiter, et vous me demandez si j’ai des rêves, à votre avis si j’en avais un lequel serait-il ?

    n Trouver un travail, un logement, pouvoir vous habiller correctement, être propre, avoir des amis, et pourquoi pas une femme, des enfants, non ?

    n Si mais je ne crois plus aux contes de fées !

    n Qu’y a-t-il d’impossible là dedans ?

    n Vous allez me donner tout ça ?

    n Peut-être, mais c’est aussi à vous de le démener pour obtenir ce que vous voulez !

    n Je ne sais plus si j’en ai encore la force !

    n Là je peux vous aider !

    n En faisant quoi ?

    n J’ai une chambre de bonne chez moi, et je peux vous trouver des vêtements, peut-être un travail, après ce sera à vous de voir !

    n Et comment je pourrais vous payer le loyer !

    n Je ne vous ai pas parlé d’argent ! Vous êtes bricoleur ?

    n Oh un peu je ne suis pas très doué !

    n On arrivera toujours à se débrouiller !

    n Pourquoi ?

    n Pourquoi quoi ?

    n Pourquoi seriez-vous prête à m’aider ? C’est votre BA du jour ? Vous vous sentez responsable ? Vous voulez vous donner bonne conscience ?

    n Eh bien ! Vous n’êtes pas un type facile !

    n Parce que j’ai de l’orgueil ?

    n Non, ça c’est plutôt encourageant, ça veut dire que vous en voulez !

    n Alors quoi ? Parce que je me pose des questions sur vos intentions ?

    n Oui ! Il vous faut absolument que vous prêtiez des intentions intéressées, calculées, perverses chez les gens !

    n J’ai appris à me méfier de tout le monde !

    n Il ne vous vient jamais à l’idée que certains peuvent vouloir vous aider mais qu’ils ne savent pas comment, et votre attitude n’a rien pour les encourager !

    n Allons-y c’est encore de ma faute !

    n Vous avez une part de responsabilité !

    n Selon vous si je suis dans cette situation c’est parce que je l’ai voulu ?

    n Je ne prétends pas cela ! Par contre si vous prenez les gens de manière agressive, personne ne vous aidera !

    n J’aimerais vous y voir vous, avec vos petites manières bourgeoises, vous n’avez sans doute jamais su ce que signifiait « avoir faim, avoir froid, se sentir minable, sale et insignifiant »

    n Est-ce une raison pour ne pas vouloir essayer de comprendre ?

    n J’en doute !

    n Vous détestez tant les humains ?

    n Non, je les méprise, ils me le rendent bien !

    n Vous êtes insupportables, je ne sais pas pourquoi je suis entrain de perdre mon temps avec vous !

    n Vous avez raison je n’en vaux vraiment pas la peine !

    n Ce n’est pas ce que je voulais dire !

    n Alors vous vouliez dire quoi ?

    n Que vous ne faites rien pour qu’on vous aime, pour qu’on vous trouve intéressant !

    n Vous allez bientôt me refiler les bondieuseries de circonstance, vous devez être une dame patronnesse ou quelque chose du genre !

    n Même pas, je suis catholique baptisée mais je ne mets jamais les pieds dans une église.

    n Vous devriez, ça vous irait bien !

    n C’est curieux plus je vous observe, que je vous écoute et plus j’ai l’impression que vous fuyez quelque chose, vous avez peur !

    n Ha ! Et de quoi pourrais-je bien avoir peur ?

    n De vous en sortir, simplement !

    n Alors là c’est encore pire que ce que je l’imaginais !

    n Ah bon ! Pourquoi donc ?

    n Ça ne vous suffit pas de vouloir jouer les bonnes sœurs inquisitrices mais en plus vous faites de la psychologie à deux balles ! Bravo !

    n Ne jouez pas à cela avec moi, vous savez au fond de vous que j’ai raison !

    n Ben voyons ! Alors j’ai la trouille de me retrouver avec une situation, un logement, des vêtements propres et à manger tous les jours !

    n En quelque sorte !

    n Dire que je vous croyais intelligente ! Qu’est ce que vous pouvez inventer comme conneries !

    n Vous craignez de perdre un peu de votre liberté, peur d’appartenir à nouveau à cette société qui vous obligera à faire des concessions tous les jours, à faire des compromis, à devoir vous retenir de dire tout haut ce que vous pensez, à devoir vous astreindre à des horaires, des habitudes. Vous avez peur de ne plus être à la hauteur, ne plus vous sentir capable !

    n Qu’est ce que vous allez chercher ?

    n Tout cela n’a rien d’anormal, je ne sais pas depuis combien de temps vous êtes à la rue, mais survivre vous a contraint à perdre non seulement des habitudes mais aussi des valeurs, des rites, et à en adopter d’autres, ceux de l’urgence. Mais avec un peu d’aide vous y parviendrez !

    n De l’aide c'est-à-dire vous ?

    n Bien sur, si vous voulez bien l’accepter !

    n Et vous prétendez que vous me soutiendrez quoiqu’il arrive !

    n Oui, je l’affirme même !

    n Permettez-moi d’en douter !

    n Vous me laisserez tomber à la première connerie !

    n Vous ne me connaissez pas, je suis entêtée vous ne pouvez pas savoir à quel point !

    n Je l’imagine aisément !

    n Alors vous venez ?

    n Quoi ?

    n Si vous acceptez mon aide c’est maintenant, après il sera trop tard !

    n Désolé je déteste les ultimatums ! Au revoir madame et merci pour le café !

    Il se leva et sortit immédiatement du café ! Elle n’osa pas le retenir malgré l’envie qui l’envahissait. Elle regrettait déjà de s’être montrée aussi catégorique. Il lui semblait avoir été à deux doigts d’obtenir gain de cause. Avait-elle eu tort de ne pas lui permettre de réfléchir ? Elle n’avait pas su tenir compte des changements brusques qu’infligeait ce qu’elle proposait. Pourtant elle ne pouvait accepter ce refus, cela revêtait alors l’allure d’un défi qu’elle se devait de relever, pour lui, pour elle, pour exister en tant qu’elle-même qui n’avait su vivre jusque là que par rapport aux autres et pour les autres, en commençant par son ex mari. Après avoir régler l’addition, elle se mit à courir après lui. Le trottoir se remplissait de têtes, de visages et de corps inconnus, difficile pour elle d’apercevoir celui qu’elle cherchait. Il avait beau être équipé de mauvaises chaussures elle savait qu’il possédait l’art de la marche grâce à l’entraînement forcé qu’il pratiquait régulièrement. Soudain son visage s’éclaircit, dessinant un sourire aux prunelles de ses yeux, elle venait de voir Marc affalé sur le trottoir, l’esprit tourmenté. Elle se hâta de l’aborder !

    n Vous aviez raison, j’ai eu tort je ne peux pas vous aider de force si vous ne voulez pas y mettre du vôtre !

    n Encore vous, mais pourquoi me harcelez-vous ?

    n Vous avez demandé de l’aide, rappelez-vous !

    n Je ne vous ai rien demandé !

    n Si vous m’avez interpellée c’est que vous vouliez que je vous remarque !

    n Pourquoi vous obstinez-vous ainsi ? Je suis irrécupérable !

    n Vous ne pouvez pas dire ça ! Vous possédez la valeur de tout être humain !

    n Je ne comprends pas votre détermination !

    n Pour être totalement honnête c’est très égoïste de ma part, je crois que j’ai besoin de me rendre enfin utile à quelque chose ou à quelqu’un. Jusqu’à présent j’ai subi mon existence. C’est vrai que je suis une gosse de riche comme vous le dites, je n’ai jamais eu à me battre pour obtenir quelque chose. Je me suis marié sans trop comprendre ce qui m’arrivait, j’ai divorcé parce que je ne me sentais pas heureuse. Je vis dans un appartement trop grand, où nous nous débattons mon fils et moi pour exister, alors vous représentez pour moi la chance de décider de ma vie, d’entreprendre, si je parviens à mener ce combat ce sera ma victoire et la vôtre, désormais nos destins sont liés.

    n Ça a au moins le mérite d’être franc, je représente en quelque sorte votre challenge !

    n Désolé, j’espère que cela ne vous blesse pas !

    n Non au contraire, je me méfie de la charité chrétienne, ça cache souvent une volonté de se faire valoir, avec vous au moins je n’ai pas ce problème.

    n C’est vrai nul n’es vraiment désintéressé, cela n’empêche pas de faire des efforts !

    n Vous ne mentiez pas en disant que vous étiez entêtée !

    n Je le prends comme un compliment ! Vous voyez, on a tout à gagner tous les deux

    n De la façon dont vous dites ça, on croirait une demande en mariage !

    n C’est un peu la même chose, deux personnes qui se lient par un contrat, deux personnes condamnées à réussir ensemble ou à échouer ensemble !

    n Vous êtes une romantique !

    n Non je suis juste quelqu’un qui essaie de ne pas rater sa vie, faute de la réussir.

    n Très réaliste !

    n Alors vous venez !

    n Maintenant ?

    n Pourquoi tarder, le plus tôt sera le mieux !

    n C’est un ultimatum encore ?

    n Non, je regrette de vous en avoir poser un, ce n’était pas très habile de ma part, mais je débute en matière d’ouverture d’esprit, vous comprenez à présent pourquoi j’ai besoin de vous ?

    n Vous n’êtes pas ordinaire ! J’accepte !

    n A la bonne heure !

    n Alors, vous prévoyez quoi ?

    n Pour l’instant vous allez vous installer dans la chambre, prendre un bon bain, vous changer, peut-être aller chez mon coiffeur, enfin, je ne vous y obligerai pas, et puis pour demain et bien…

    n Oh demain c’est encore loin !

     

     

     

     

     

                                                                                                                    FIN

     

     

     

     

     






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