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Les Textes de Vincent
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Les Textes de Vincent

VIP-Blog de vinny53poesie
  • 45 articles publiés
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  • Créé le : 25/03/2010 19:07
    Modifié : 26/06/2012 15:26

    Garçon (52 ans)
    Origine : la Mayenne
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    [ Les Furtives ]

    Trois Ans Déjà

    10/04/2010 12:13



    Trois Ans Déjà

     

     

    Les lilas refleurissait, depuis plusieurs semaines déjà les pissenlits avaient repris leur droit sur le ray gras de la pelouse. Rien ne changeait d’année en année, et pourtant !

    Trois ans s’étaient écoulés depuis la disparition de Diane. Trois années à vivre malgré tout en tentant vaille que vaille de retrouver un sens à l’existence. En regardant son jardin Jacques ne pouvait se soustraire à cette image à la fois merveilleuse et insoutenable de sa fille chérie entrain de jouer à travers les massifs d’azalées, les bosquets de laurier palmes, cueillant ici une cerise, là quelques noisettes, où préparant le repas avec sa dînette pour ses poupées. Mais cela se passait bien avant ! La petite fille avait cédé la place à cette adolescente maussade et coléreuse. Il n’était plus possible de l’aborder sans engendrer une raillerie ou quelque sarcasme émanant d’une voix bougonne et méprisante. Difficile déjà pour Aline et Jacques de supporter le maquillage sombre, les jeans déchirées, les chemises trop larges et les cheveux sales non coiffés, mais la patience, la tolérance et beaucoup d’amour sans doute, leur avaient permis de surmonter ces obstacles. Chaque jour devenait un réel conflit principalement avec Jacques. Aline, quant à elle, comme la plupart des mamans avait la faculté d’accepter, de comprendre, d’écouter en dépit des reproches dédaigneux dont Diane la gratifiait régulièrement. Jacques prenait facilement la mouche et s’énervait, maladroit, comme bon nombre de pères, il regrettait souvent ses emportements sans oser s’en excuser. Cela constituait peut-être la vraie raison du départ de sa fille, c’est du moins ce qui lui semblait le plus probable en cette matinée de fin de printemps.

    Comment oublier ce terrible soir où, pour une fois, il ne s’était pas attardé au bureau, épris de bonnes résolutions, il avait décidé de dialoguer avec sa fille, tenter par ‘Dieu sait qu’elle approche, de lui permettre de se lâcher en

    déballant tout ce qui la rongeait. Mais en arrivant il ne trouva que son épouse effondrée sur la canapé, tenant en main une lettre froissée sur laquelle il put lire:

    «  Je pars, j’en ai ras le bol de vos jérémiades et de vos reproches! J’ai envie de vivre ma vie sans vous avoir sur le dos, croyez moi ce sera mieux pour vous aussi!

    Surtout ne me recherchez pas ce serait du temps perdu!

    Salut

    Votre fille.

     

    Le ciel s’était écroulé sur la maison, ne laissant que désespoir et incompréhension. Aline s’était enfoncée dans une dépression et Jacques s’était démené auprès des force de gendarmerie, posant des affiches, passant des appels en radio et télévisions. Pendant un an tout le monde s’était dévoué presque vingt quatre heures sur vingt quatre, et puis… plus rien. Chacun disait qu’à dix sept ans la jeune fille avait choisi de vivre ailleurs et l’arrivée de sa majorité l’autorisait à ne plus revoir sa famille, on devait respecter ses choix. A les entendre les droits de Diane primaient sur les siens et ceux de sa femme. D’ailleurs qu’Est-ce qui leur permettait de prétendre qu’elle ne regrettait pas son départ soudain ? Il pouvait lui être arrivé un malheur. Il avait tout imaginé: La secte, la tyrannie d’un pédophile, un psychopathe, ou même son intégration dans un gang ou une bande de violents pervers. Diane était en révolte contre ses parents et cela pouvait se traduire par une violence redoutable à l’égard d’autres adultes. Pendant ces trois ans il ne s’était pas écoulé un jour sans que Jacques n’ait imaginé les expériences les plus horribles pour sa fille. Aline restait prostrée dans son mutisme, sans exprimer la moindre de ses angoisses. Sans doute partageait-elle celles de son mari, mais son accablement ne l’autorisait pas à laisser échapper la plus petite émotion. Jacques se sentait seul dans cet enfer de doutes. Certes il ne reprochait rien à son épouse, comprenant même son abattement et sa douleur, d’autant qu’il la partageait, mais il se sentait abandonné par celle qui représentait pour lui l’unique la dernière raison de vivre et d’espérer. A la pensée que sa petite fille chérie pouvait être livrée à l’enfer, il ne trouvait plus la moindre raison de se laisser aller au repos qu’il méritait pourtant. La douleur qui l’envahissait étreignait son être de toutes parts. Pas une seule journée ne lui avait offert une occasion de se détendre ne serait-ce qu’une heure seulement pendant ces trois années d’angoisses. Fallait-il être un père indigne pour qu’une enfant veuille à ce point le fuir! Quelle terrible faute avait-il commise pour ainsi se voir banni de l’existence de sa fille. En quoi Diane justifiait-elle les raisons de son mépris. Aucun père n’est parfait, tous sont maladroits, ridicules, dépassés ou incompréhensifs, mais cela mérite-t-il donc que leur enfant les largue de manière aussi cruelle. Jacques avait conscience de ses maladresses et des intolérances dont il avait parfois fait preuve. Il se souvenait avoir été idiot et injuste en refusant des sorties de manière catégorique et sans réelle justification de sa part. Il réalisait aussi les blessures infligées par ces petites phrases cinglantes que tout père, aussi ouvert soit-il, lance comme un ballot encombrant sur la personne qui a la malchance de se situé au mauvais moment face à lui. Combien de fois avait-il analysé toutes ces erreurs qui ne cessent de refaire surface lorsqu’on est confronté à ce genre de blessures. Les mois, les saisons, rien ne lui avait permis d’apporter les réponses qui lui manquaient depuis le premier jour, la première heure. Il gardait en mémoire le défilé des banalités de tous ces gens qui, par esprit de soutien, se croyaient obligés de le dédouaner de ses imperfections en accablant sa fille d’immaturité, de capricieuse enfant gâtée, de gosse difficile. Parfois même les plus indulgents le rassuraient en lui disant qu’elle ne tarderait pas à revenir, qu’elle préfèrerait rapidement le confort de sa chambre douillette à l’incertitude du lendemain à travers les rues sombres du danger. Tous n’étaient qu’un ramassis d’ignorant qui se permettaient d’émettre des jugements hâtifs et téméraires sachant qu’en rentrant chez eux, ils trouveraient leu enfant bien au chaud dans un foyer nanti de paix et d’amour. Lui ne connaîtrait plus jamais cette paix, cette harmonie; on devrait toujours parler à ceux qu’on aime en les écoutant, les choyant, les embrassant, les serrant au moins une fois par jour dans ses bras en leur répétant qu’on les aime et combien ils nous sont indispensables, se murmurait-il alors qu’il essuyait d’un doigt la larme qui se hasardait sur sa joue. Bien sûr qu’il était coupable, cela ne faisait aucun doute ! Mais il aurait tout donné pour qu’on lui offre l’occasion de réparer la ou les fautes qu’il avait commises en tenant contre lui la tendre chérie qui lui occasionnait tant de souffrances.

    Aline se réveillait de temps à autre, juste le temps de sortir de sa torpeur. En ces instants d’éphémère lucidité, elle se levait, se préparait un café, s’aventurait dans une conversation artificielle sur les commissions qu’elle devait faire, des rendez-vous éventuels et des appels téléphoniques qu’il lui fallait effectuer. Elle passait du coq à l’âne avec une facilité étonnante, au point que son époux se perdait dans ce dédale de mots insensés. Après avoir épuisé son stock de sujets, elle se livrait à ce qui semblait devenir peu à peu son activité favorite, vider les bouteilles de vodka. Jacques semblait vouloir ignorer le nouveau travers de sa femme, sans doute par compassion, par culpabilité aussi et surtout parce qu’il ne trouvait aucun remède à cette défaillance. Il s’efforçait de croire que cela constituait peut-être le meilleur palliatif à la douleur intense qu’elle éprouvait même si lui-même ne se sentait pas attirer par ce vice. Il se sentait tellement impuissant face à la déchéance de sa partenaire de douleurs. Certes, la plupart du temps il s’évertuait, en bon mâle qu’il était, à garder égoïstement le mal qui l’oppressait, se plaisant à penser qu’il avait de bonnes raisons de souffrir davantage, il entretenait avec un certain masochisme confortable, l’idée qu’on lui avait infligé cet enfer à lui plus particulièrement en raison de ses maladresses passées, de sn indifférence et de ses trop lourdes absences. Sans ignorer qu’Aline partageait équitablement l’horrible sanction qui les frappait, il se cantonnait dans son marasme égocentrique qu’il arborait tel une blessure de guère qui lui valait la compassion de ceux qui le voyaient comme une victime qui devait faire face, seule, en assumant la charge d’une mère démissionnaire et alcoolique. Il n’était, certes, pas conscient de cette position. Il affrontait, malgré tout, avec courage et volonté son calvaire sans relâche, mais le mal insoutenable qui l’accablait devenait tel qu’il lui était nécessaire de s’en décharger de temps à autre sur le dos de sa compagne. Curieusement, Aline et Jacques ne semblaient plus un couple, mais deux partenaires distants dans la douleur, accomplissant leur cheminement dans des couloirs séparés, ne se rejoignant que très rarement. L’amour avait-il déserté le foyer ? Sans doute une partie de cet amour avait-il fui dans les bagages que celle qui les avait quitté. D’ailleurs l’amour ne se voulait plus d’actualité au sein de ce Couple, ils avaient d’autres chats à fouetter, d’autres sujets pour s’étaler, d’autres ébats où se morfondre. Tout sentiment s’était évaporé de ces lieux où la passion se renouvelait jadis de jour en jour. Le désir, quant à lui, était obsolète depuis l’horrible jour. Rien ne rapprochait plus ces deux êtres que tout et tous avaient oublié en dehors de Dieu, peut-être ! S’il restait encore quelque vie en ces lieux, il ne fallait pas la rechercher à l’intérieur mais au dehors, dans ce jardin où le printemps, s’obstinait coûte que coûte à revenir d’année en année. En admirant ce paysage coloré, parfumé et tellement effervescent, Jacques se surprenait à esquisser un sourire en guise d’émotion, la seule dont il pouvait encore faire preuve. Dieu qu’il les aimait ses lilas tout habillés de mauve, aux senteurs enivrantes et discrètes ! Le soleil les couvrait d’un faisceau caressant comme si un saint eut annoncé sa venue d’un rayon lumineux en guise d’éclaireur. Le grand chapiteau d’azur embrassait cette étendue de vert, de bleu, de mauve, de jaune et de rose pour égayer ce cadre taciturne. Était-il de bon aloi de se réjouir encore des merveilles qui s’offraient ainsi sans le moindre cynisme ? Avait-il le droit de sourire, de croire, de ressentir, d’espérer ? Lui était-il permis de vivre en un temps où la vie s’était depuis longtemps bloquée ?

    Comme tout cela semblait moche ! Evidemment pas le paysage mais le simple fait de ne plus pouvoir s’en délecter. Le monde lui-même revêtait ces mêmes allures d’inutile ! Pourquoi la vie, puisque ni lui ni Aline n’étaient autorisés à s’y ébattre ? Pourquoi toutes ces choses qu’il appréciait en cet instant magique s’acharnaient elles à évoluer, à se transformer, à rayonner devant son regard émerveillé puisque son cœur était en position de veille ? Non, rien n’interdisait à Aline ni à lui de poursuivre un chemin de vie. Repartir, pas tout à fait comme avant mais avancer un peu en se disant que peut-être un jour béni, l’enfant prodigue retrouverait le chemin de la maison et qu’on saurait s’exprimer librement, sans tabou, pour dissiper tous les doutes et les non-dits. En attendant de tuer le veau gras, Jacques se devait de se mettre debout aux côtés de son épouse, celle qu’il n’avait finalement jamais cessé d’aimer.

    Prendre une bonne résolution semblait, somme toute un pas en avant, mais s’y tenir demandait une somme de courage intense auquel Jacques ne parvenait pas à s’atteler. Il lui fallait reconquérir le cœur de son épouse afin de reprendre à deux le collier de la tâche qu’il se promettait d’effectuer, à savoir, revivre ! Pour cela Aline devait se soustraire à son besoin quasi insurmontable d’alcool, ce qui en soit constituait déjà pour lui un réel défi. Le capitaine Bougeant qui dirigeait l’enquête de gendarmerie avait la délicatesse d’appeler chaque semaine pour tenir le couple au courant du déroulement de l’enquête, en prenant soin de se renseigner sur l’état de santé de madame. Si la sollicitude du gendarme ne soulageait guère les époux, elle permettait cependant de prouver qu’on ne les abandonnait jamais même si Aline restait persuadée du contraire, Jacques, lui se sentait un peu soutenu.

    Un matin après une nuit enfoncée dans un sommeil artificiel provoqué par les médicaments prescrits par le bon docteur Chazon, Jacques eut la surprise de trouver sa femme dans la cuisine entrain de vider sa seconde canette de bière. Elle n’avait pas l’habitude de se livrer à son occupation favorite de si bonne heure. Curieusement au lieu d’en ressentir une cinglante colère il se prit à sourire en lui demandant s’il en restait de façon à l’accompagner dans cette « beuverie » conjugale. Pourquoi, pensait-il, laisser passer la seule occasion de partager encore quelque chose, il l’aimait toujours et malgré tout, ce moment représentait peut-être pour eux deux une manière de se retrouver. Aline n’y mettait pas vraiment du sien. Elle enfilait sa bière avec une moue qui n’offrait pas le moindre atout de séduction. Les seuls mots qu’elle laissait échapper n’étaient qu’insultes à propos de son manque de virilité. La grossièreté de ses propos ne ressemblait en rien à la classe naturelle et l’élégance qui la caractérisaient. En dépit de cela, Jacques ne désarmait pas, il persistait dans sa bonne humeur, lâchant çà et là un calembour, un mot d’esprit, ou une simple boutade. Hélas, rien ne semblait atteindre la bougonnerie de ce visage au regard éteint. Loin, cependant de se décourager il maintenait quoiqu’il en fût son allure altière en arborant sa mine joviale. Il plaisantait, et plus elle redoublait de sarcasmes, plus il s’entêtait à trouver des blagues inventées. On aurait dit qu’elle lui lançait un défi au point qu’elle se prenait au jeu, esquissant de temps à autre un sourire qu’elle ne pouvait plus contenir tant les efforts de son mari lui semblaient méritant. Au bout d’un moment elle finit par éclater de rire, le traitant de « con » ou de « salaud » comme s’il avait eu osé commettre un sacrilège en profanant ainsi une bougonnerie inflexible. L’air triomphant il lui prit la main et l’entraîna en courant dans le jardin. Courant ainsi à travers le petit parc, ils se prirent pour des gamins qui savouraient la folie de leur premier émoi. Elle le regardait avec étonnement, comme si elle eut découvert en ces instants de nouveaux attraits chez celui de qui elle pensait tout connaître. Il n’était pas peu fier de ce nouvel éclat qu’il produisait, redécouvrant à son tour, son amour de toujours. Depuis cet instant, ils décidèrent de vivre, comme si leur enfant pouvait franchir la porte d’un moment à l’autre, s’affalant sans un mot sur le divan, comme elle l’avait si souvent fait auparavant. Vivre comme si elle était bien là où elle avait choisi d’aller. Vivre comme si la terre n’avait jamais cessé de tourner. Vivre comme si les choses allaient de soi. Aline ne buvait plus et Jacques se faisait attentif et prévenant. Il avait repris le travail, se contentant de n’y être présent que le minimum d’heures nécessaires. Il lui arrivait même parfois de rentrer un peu plus tôt, se précipitant pour enlacer sa femme, l’étreindre et l’embrasser fougueusement sans vouloir la lâcher. Loin de s’en plaindre, elle se faisait lascive et tentatrice, s’effeuillant nonchalamment afin de lui offrir les attraits de son corps, prouvant là qu’elle n’avait perdu ni en beauté ni en sensualité. Leurs ébats s’éternisaient alors en caresses, en baisers voluptueux. Ils formaient un couple heureux, épanoui, chacun cherchant à cultiver le bonheur de l’autre. A la mi-juin, ils s’offrirent un voyage en Andalousie, là où ils avaient effectué quelques années auparavant leur voyage de noces. Ils retrouvaient toutes ces choses qui les avaient séduit alors, comme si l’amour s’évertuait délicatement à préserver les merveilles que l’on tient dans l’écrin secret de son cœur. D’aucun aurait pu prétendre qu’ils avaient fait le deuil de leur fille ou pire qu’ils se moquaient de ce qui pouvait lui advenir. Pourtant, installée au plus fort de leurs pensées, elle demeurait là, aussi présente qu’elle l’avait toujours été, peut-être davantage encore, car chaque plaisir partagé, chaque découverte révélée, chaque joie ressentie, lui était dédiée comme des symboles. Bien sûr tout cela restait inconscient et presque indicible, car ni l’un ni l’autre ne prononçait son prénom. Mais Diane envahissait leur être de son éclat, de sa froideur aussi, de ses colères, de ses cris et sa musique aux plus hauts décibels. Evidemment qu’elle leur manquait ! Elle leur manquait lorsque quelque adolescente qui les bousculait, s’excusant à peine, affichait ce minois si doux et grincheux à la fois. Elle leur manquait aussi quand aux pages d’un livre ils découvraient un mot dédié à un petit copain du moment où le « i » de «  je t’aime » était vêtu d’un petit cœur soigné. Elle leur manquait de même chaque fois que la photo poster du grand salon où s’illuminait le sourire de ses dix ans semblait ternir. Diane vivait là, partout, curieusement plus présente, qu’elle ne l’avait été depuis ces quelques années. Comme il est triste de constater qu’à force de s’habituer à la présence de ceux qu’on aime on finit par en oublier presque leur existence, qu’il faille alors qu’ils s’enfuient pour en prendre conscience. Malgré le bonheur des retrouvailles de leurs prémices d’amour, ils auraient tant donné pour la voir réapparaître au cœur de cette maison encore trop vide malgré tout.

    L’été allait bientôt s’achever, déjà le jardin s’effeuillait petit à petit et les fleurs s’étaient éteintes depuis plusieurs semaines. La maison déployait ses allures de tristesse, seule la pluie frappant aux carreaux des baies vitrées rythmait cette lourde matinée. Jacques et Aline sortaient à peine des nimbes lorsque la sonnerie du téléphone retentit, Jacques décrocha, un peu agacé qu’on le dérangeât si tôt. Une voix lointaine se fit entendre «  ne quittez pas je vous passe quelqu’un » disait-elle. «  Papa, c’est Diane, je suis à Paris, à la gare, peux-tu venir me chercher ,.. » puis elle fut coupée. Sans doute avait-elle dépensé ses dernières pièces pour appeler ses parents. Jacques resta pétri. Aline voulait l’interroger, mais à voir son visage entre émotion et stupéfaction, elle devina. Sans plus attendre ils se dirigèrent vers Paris, les deux heures qui s’écoulèrent au long de l’autoroute revêtaient des aspects de folie enrobées de silence. Chacun imaginait son scénario sans oser le soumettre à l’autre. Mais ils se rejoignaient dans l’inquiétude et l’appréhension. Qui allaient-ils retrouver devant eux ? Était-elle démunie, maigre, triste, fade ? Aline aurait voulu le harponner de questions sur le ton de sa voix, sa gravité, avait-elle des larmes ? Mais craignant de l’irriter, elle se tut sans jamais détacher son regard du visage de celui avec qui elle avait partagée ce calvaire, mais était-ce réellement la fin ? Arrivés à la gare, leur cœur se compressait, ils la cherchaient partout croyant la trouver ici, là, dans tel ou tel coin. En fait c’est elle qui les découvrit, elle se tenait là, debout, adossée à une colonne. Vêtu d’un jean sale et usé, un bandana dans les cheveux, chaussée de vieux tennis. Ses yeux au rimmel ancien, laissaient transparaître des tâches qu’on pouvait assimiler à des larmes. Mon Dieu pensaient-ils que lui a-t-on fait ! Personne ne parvenait à avancer. Eux craignaient la brusquer en se laissant aller à des milliers de questions qu’elle pourrait prendre pour un interrogatoire inquisiteur. Elle éprouvait tant de gêne qu’elle craignait les aborder sans explication. Ils se regardaient à quelques mètres les uns des autres. Autour c’était la cohue, les passagers allaient et venaient sans se soucier de l’évènement. Jacques, Aline et Diane ne voyaient rien, ils s’aimaient du regard, se conjuguaient, s’embrassant du bout des yeux, du fond du cœur. L’éternité qui les enlaçait ne parvenait pas à les arracher à l’immobilité qui les accablait. Diane fit un pas, Jacques aussi, et Aline suivit. Il lui demanda si elle allait bien, elle répondit d’un hochement de tête. Aline pleurait , la bouche de Jacques commençait à émettre des tremblements, sa gorge s’étreignait, n’en pouvant plus Diane se précipita dans les bras de son père, en déversant sur son épaules les larmes qu’elle contenait depuis longtemps. De son autre bras elle saisit le cou d’Aline qui s’approchait et les serra très fort pendant de longues minutes. Rien ne pouvait décoller ces trois êtres attachés par le cœur. Sans un mot, ils se dirigèrent vers la voiture, Jacques emmena le bagage léger qui se tenait près de sa fille, ensemble ils rentrèrent dans un silence ponctué de vagues banalités un sourire les animait, ils étaient heureux, vivants, ils formaient une famille, enfin !

     

     

     

     

    (Trois Ans Déjà)

    Vincent GENDRON

    Mars-Avril 2010.

     






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