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Les Textes de Vincent
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Les Textes de Vincent

VIP-Blog de vinny53poesie
  • 45 articles publiés
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  • Créé le : 25/03/2010 19:07
    Modifié : 26/06/2012 15:26

    Garçon (52 ans)
    Origine : la Mayenne
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    [ Les Furtives ]

    Les Furtives :Réveil à Solenzara

    26/03/2010 13:52



                                                                                               Réveil à Solenzara

                                                        Le soleil étouffait les senteurs du maquis. Après avoir passé le cap Corse, Etienne se réjouissait de ces routes un peu moins escarpées et surtout moins dangereuses pour le chauffeur du dimanche qu’il pensait être. Il avait déjà passé deux nuits à la belle étoile et se résolvait à passer la suivante, aussi mal installé que lors des deux précédentes. Cette fois il attendrait la nuit noire pour se confectionner un petit nid à l’intérieur de cette voiture de location. Encore fallait-il que ce soleil de plomb ait l’intention de s’éclipser en emportant avec lui toute la lourdeur qu’il flanquait. Il n’allait bientôt pas tarder à apercevoir les lumières de Solenzara. Se souvenant de la chanson, de cette musique qui faisait chanter ce nom de ville déjà tellement exotique à lui seul, il se plaisait à répéter ce nom «  Solenzara » comme s’il avait été celui de la femme de sa vie. Pourtant il n’était venu en Corse ni par amour, ni par dépit mais pour le plaisir de changer de destination. Depuis sa plus tendre enfance il s’était aiguisé les pieds sur les plages de Bretagne et chaque été il se faisait un devoir de retourner dans ces lieux certes magiques et mythiques mais qui finissaient par sentir le réchauffer. Alors se munissant d’une carte, il avait laissé le sort en décider en jetant une pièce sur la carte, celle-ci s’était retrouvée entre Bastia et Ajaccio. Il en avait déduit qu’il devait faire le tour de l’île de beauté. Oh il n’était pas déçu, jusque là son voyage s’était déroulé à merveille. Pas trop de touristes, du soleil sans fin, des autochtones accueillants, et des paysages à n’en plus finir de s’éblouir. Mais les routes accidentées du Cap Corse l’avaient éreinté au point il ne se sentait même plus la force de se réjouir de toutes ces beautés.

    Une fois bien installé dans son étroit habitacle, il s’endormit comme une masse au son du ressac qui le berçait. Aux premières lueurs du jour il savoura le spectacle du soleil levant sur la plage de Solenzara. Ce fameux soleil offrait ses lueurs argentées aux flots turquoises qui se peignaient ainsi de filaments auréolés se mouillant d’écume et de douceur. « Quel chef d’œuvre divin ! », songeait Etienne ébloui par tant d’éclat. Le vent tiède caressait fébrilement le cuir de sa peau, la tannant afin de la rendre satinée. Ce qu’ignorait ce trentenaire un peu fantasque, c’est qu’il n’était pas le seul à se délecter du spectacle que dame nature lui offrait. A quelques mètres de là une silhouette l’observait. Les formes harmonieuses de son anatomie ne laissaient pas le moindre doute quant à son sexe. En s’approchant un peu de cette femme, on pouvait remarquer la rudesse du regard noir et puissant de ses yeux dessinés en amande sur un visage fort et hâlé. Debout et immobile dans une robe blanche ornée de fleurs discrètement colorées de teintes pastelles elle fixait son regard sur celui qui semblait la fasciner. Etienne ne s’apercevait de rien, loin d’imaginer la fascination qu’il exerçait sur la jeune femme, il errait à travers la plage comme le touriste admiratif qu’il demeurait avant tout. Il ne se laissait pas distraire par un cormoran qui le survola de près. De même, il ne fut pas stupéfait de voir passer un cochon sur le bord de la route comme il avait précédemment aperçu une chèvre qui se promenait en toute quiétude, libre et avide du moindre brin d’herbe qui se présentait à elle. En fait le jeune homme n’avait d’yeux que pour ce levant que le ciel peignait en or et en argent où quelques touches de pourpre et d’ocre achevaient d’illuminer l’azur. Il resta une demi heure à contempler son spectacle avant que d’explorer le monde qui l’encerclait. C’est alors qu’il distingua la silhouette de son admiratrice. Elle ne détourna pas son regard pour autant, esquissant un sourire de satisfaction sans manifester pour autant sa joie. Ils restèrent quelques minutes à s’observer, sans oser le moindre pas, le moindre geste. Puis, épris d’une soudaine audace, il se lança dans une foulée éperdue pour rejoindre celle qui commençait à l’intriguer :
    n Bonjour ! (entama-t-il sans en préambule)
    n Salut (répondit-elle d’un ton plus assuré) tu n’es pas d’ici ?
    n Non ! Je suppose que ça se voit ?
    n Oui ! Mais tu n’es pas un de ces cons de touristes ! Tu admirais quoi là ?
    n Le lever de soleil, je n’en n’ai jamais vu d’aussi beaux !
    n Tu sais chez nous tu verras des choses qu’on ne voit pas ailleurs ! Tu veux que je te montre quelque chose d’encore plus beau ?
    n Oui j’aimerais bien, si ça ne te dérange pas !
    n Pff ! Au contraire, mais je ne le montre qu’à ceux qui savent l’apprécier !

    Ils marchèrent pendant un long moment, elle filait devant, il s’efforçait de la suivre à grands pas. Etienne s’impatientait, demandant si c’était encore loin. Parfois elle s’arrêtait se retournant d’un regard malicieux en le rassurant. Il lui semblait qu’ils étaient partis depuis des heures, en fait ils venaient de dépasser l’heure lorsqu’elle lui balança avec son plus beau sourire :

    n Tiens regarde, tu vois que ça valait bien la peine !

    Il se tourna vers l’horizon afin de vérifier ce qu’elle pointait du doigt. A quelques centaines de mètres de là, il aperçut un îlot rocailleux assailli de toutes parts par les flots. Par instant une vague d’écume bouillonnante recouvrait entièrement le monticule. Chose encore plus étrange, une famille d’albatros y avait élu domicile depuis plusieurs générations et rien de ce qui pouvait se dérouler là ne semblait les déranger. Ils survolaient en permanence leur lieu de prédilection, assurant une protection à leur nid en prenant soin de veiller à ce qu’il fût toujours épargné par les postillons des vagues inquisitrices. La jeune femme précisa que depuis plusieurs siècles l’îlot n’avait jamais été recouvert en dépit de certaines grandes tempêtes et que la famille albatros avec l’attention méticuleuse qui la caractérisait bâtissait régulièrement le nid au beau milieu des rochers, le seul endroit que l’écume pouvait épargner de telle sorte que jamais les petits ne s’étaient trouvés mouillés. On aurait pu croire à une de ces vielles légendes colportées par les anciens lors des veillées au coin du feu, destinées à transporter l’esprit des enfants dans les nuées féeriques. Pourtant l’histoire était bien réelle et chaque génération avait eu le loisir de le constater de ses propres yeux. Etienne demeurait stupéfait, à la fois par ce qu’il voyait et ce qu’il entendait. Et plus la jeune femme racontait et plus il se sentait séduit sans savoir s’il l’était davantage par la narratrice que par les merveilles qu’il admirait. Sans doute cette savante harmonie entre le paysage, le spectacle qu’il découvrait et le charme si naturel de celle qui appartenait à ce pays composaient ensemble les attraits destinés à séduire son cœur émerveillé d’éternel enfant. Il planait au cœur de cette île que l’on dit «… de beauté » certainement pas par hasard, et il se sentait amoureux d’un tout.
    Elle se tourna vers lui, l’interrogeant du regard, devinant alors le trouble en son esprit. Elle ressentait le désir de l’embrasser, de l’étreindre pour le bonheur qu’elle éprouvait de le voir ainsi communier à cette extase qui ne la lâchait jamais depuis l’enfance chaque fois qu’elle venait se délecter de tous les tableaux que contenait l’île. Puis ne pouvant résister à son envie, elle lui colla un long baiser sur la joue. Le jeune homme sembla presque indifférent à cette gratification, le regard toujours accroché, il paraissait ne rien ressentir. C’est alors qu’éprise d’une de ces audaces méridionales, elle le saisit par le cou, et lui dévora les lèvres d’un baiser plus fort et plus long, cherchant désespérément à lui attraper la langue. Hélas pour elle les lèvres restaient soudées, peut-être par l’effet de surprise, ou par la timidité, toujours est-il qu’il s’écarta vivement lui infligeant un regard accusateur. Elle se sentit honteuse et stupide, ses joues bronzées s’empourpraient, la tête baissée et les paupières fermées, elle aurait voulu s’évader à toute allure. Etienne aurait voulu lui exprimer son regret de l’avoir blessé, mais une sorte de colère l’habitait, il pestait intérieurement contre la sauvagerie de cette « petite aventurière » qui le laissait penser qu’elle devait se jeter sur tous les hommes qui se présentaient à elle. Il avait cru discerner une femme nature mais raffinée, une petite fée des maquis, une sirène des grèves, une déesse des forêts, mais il ne voyait plus qu’une « fille de joie », une fille à tout le monde, une dévoreuse d’amants. La jeune fille le boudait, comme si elle avait pu sonder ses pensées. Puis comme si elle avait oublié l’incident, elle lui fit signe de la suivre jusqu’à un figuier lui demandant de lui cueillir l’un des fruits trop inaccessible pour sa taille. Il lui cueillit volontiers et se servit ensuite. Les figues étaient à point, leur chair rougeâtre offrait le goût délicieux de la nature sauvage. Cette appréciation unanime de leur fruit respectif, leur permit une complicité instantanée. Ils se souriaient, au point de baver le jus qui ruisselait sur leur menton. Un parfum d’Eden les enivrait, leur fruit n’était certes pas défendu, mais ils le partageaient avec la même volupté que le premier homme et la première femme. Il se sentit idiot et comme pour s’excuser de son attitude précédente, il lui adressa un sourire plus chaleureux, qu’elle reçu comme un cadeau. Ils se sentirent alors plus sereins, plus détendus, sans la moindre ambiguïté dans leurs échanges. Ils ne se parlaient plus qu’avec les yeux. Consciente de leurs goûts communs, elle avait envie de lui faire découvrir tout ce qu’elle admirait dans son île. La sauvagerie du maquis, aux arbousiers capiteux, aux figues de barbarie odorantes, les plaines aux vergers si verts d’où jaillissaient les mandariniers, les clémentiniers et autres hybrides aux fruits tout aussi savoureux. Les forêts de châtaigniers aux senteurs discrètes et exquises. Les prairies touffues où les vaches, les moutons et les chèvres paissaient en harmonie sans la moindre rivalité. Et tous ces gens au caractère bien trempé, au geste vif et fort mais qu cœur tendre pour peu qu’on sut y atteindre le point sensible. Elle voulait tout lui faire connaître comme s’il eut été destiné à séjourner éternellement. Lui-même en oubliait la brièveté de son séjour tant tout le retenait ici. D’un geste machinal, elle lui prit la main puis ils flânèrent le long de la plage sans se soucier de ce qui pourrait leur arriver. Après plusieurs centaines de mètres ils finirent par s’asseoir sur un rocher qui traînait là comme oublié par les flots. La jeune femme qui ne s’était toujours pas présentée ignorant également le prénom de son nouveau compagnon, se laissa aller aux souvenirs d’enfance. Ainsi en peu de temps il sut qu’elle était née à Solenzara, qu’elle y avait toujours vécu et ne souhaitait en aucune façon quitter ces lieux ou même visiter d’autres régions que sa Corse d’Amour, comme elle se plaisait à la nommer. Elle aimait à lui enseigner les courses folles à travers le maquis sauvage, les embuscades des forêts et les jeux insensés sur les flots lorsque les courants permettaient de surfer sur les vagues. Elle prenait soin de lui indiquer qu’elle n’avait jamais accepté de poupée ni de dînette dont raffolent habituellement les petites filles. Mais elle prenait soin d’ajouter que les garçons ne l’avaient jamais laissé indifférente et que depuis sa puberté, séduire avait été l’une de ses grandes préoccupations. Elle ne mentionnait ni son âge, ni son identité, comme si elle eut envie de créer un mystère autour d’elle. Il lui donnait environ vingt cinq ans même si parfois ses propos pouvaient évoquer l’immaturité de l’adolescence due à sa sauvagerie. Un instant elle se tut et l’observa attentivement comme pour le sonder, l’interroger du regard. Il répondait à ses interrogations par d’autres tout aussi troublantes. Puis, épris d’un désir fou et soudain, il l’enlaça et renouvela sa tentative de baiser, elle y répondit sans se débattre, éprouvant même un certain plaisir au point qu’elle entreprit de lui rendre en y mettant plus de fougue et de passion. Cet échange s’éternisa sans qu’ils pussent en imaginer la durée. Ils vivaient dans un monde où le temps et les choses ne se mesurent plus qu’à l’intensité des palpitations du cœur. Ils nageaient, ils volaient, ils planaient même au-delà de tout. Subtile magie par laquelle cette île venait de prendre en ses filets deux êtres inconnus qui venaient de se reconnaître en partageant la folie d’une indescriptible éternité.




    FIN








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